TAIZÉ

Israël, Territoires Palestiniens, Liban

Journal d’un pèlerin de confiance

 
Un frère de Taizé vient de passer 15 jours en Terre Sainte et au Liban, du 21 novembre au 6 décembre. Voici un récit de son voyage.
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Jaffa (Joppé)

Arrivée en pleine nuit, et quelques heures de sommeil dans une communauté franciscaine accueillante à Jaffa, à quelques mètres de là où l’apôtre Pierre a eu sa vision (voir Actes 10, 9-16) alors qu’il logeait chez Simon le corroyeur. C’est là que l’Église a commencé à saisir son appel à l’universalité. Il n’est pas difficile d’imaginer Pierre sur l’une de ces terrasses regardant la mer qui appelle à une vision large et universelle.

Voyage le même jour vers Nazareth. Accueil des plus chaleureux dans une famille de Nazareth. Au fil des années, toute la famille est passée par Taizé : père – maintenant décédé –, mère, les trois frères, et la sœur et ses enfants. Nous sommes une trentaine à nous retrouver le soir même pour une prière avec les chants de Taizé chez les Petits frères de Jésus. C’est là que le Bienheureux Charles de Foucauld a vécu un an. Cette prière correspond à un rendez-vous mensuel. Nous sommes de nouveau réunis le lendemain pour un partage biblique sur la première béatitude : « Heureux les cœurs de pauvres, le Royaume des cieux est à eux. »

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Groupe chinois priant devant l’église fermée de Naïn

Naïn, à 15 minutes de Nazareth. J’avais envie de voir ce lieu où saint Luc, au ch. 7, montre la compassion du Christ pour la souffrance humaine. Nous découvrons une église fermée, des détritus partout, dans la cour de l’église on respire quelques odeurs suspectes. Il n’y a que moi et Sammy, un jeune de Nazareth qui m’a conduit à Naïn dans sa vieille voiture. Soudain arrive un bus, et une quarantaine de Chinois descendent. Celle qui guide le groupe lit le texte de Luc sur Jésus à Naïn en donnant un bref commentaire. Quand elle a fini, je me sens poussé à la saluer. Elle ouvre grand les yeux quand je lui dis que je viens de Taizé. Elle connaît plusieurs frères, et dans son groupe plusieurs sont venus chez nous. À sa demande, je dis quelques mots sur Naïn puis je demande si on peut chanter un chant de Taizé. J’entonne « Bless the Lord » et grande est ma surprise d’entendre ce chant repris par tout le groupe. Les quarante Chinois sans exception chantent de tout leur cœur ce même chant, mais en chinois. Un beau moment.

À Jérusalem, bel accueil dans la communauté catholique hébréophone située dans la rue Rav Cook, à cinq minutes de la vieille ville. Ici, on cherche à vivre un christianisme inculturé et on ne ménage aucun effort pour s’exprimer et prier en hébreu. Une prière avec les chants de Taizé a lieu dans la chapelle de cette communauté tous les 15 jours. Ce sera le cas ce soir. Parmi les participants il y a un rabbin et quelques jeunes juifs qui sont de bons amis. Je reconnais Reut, qui a entraîné son fiancé. C’est la première fois qu’il se trouve dans une assemblée chrétienne. Je les retrouverai quelques jours plus tard dans la synagogue de ce même rabbin pour une prière suivie d’un repas de sabbat.

Le lendemain, après une messe à Ein Karem (lieu de la Visitation) et un bel échange avec les Sœurs de Sion, je suis de nouveau à Jérusalem, à deux pas du Saint-Sépulcre pour une prière avec les chants de Taizé dans une église luthérienne. Les jeunes sont venus nombreux pour y participer, notamment des Allemands qui sont volontaires en Israël. Il y a aussi le père abbé d’Abu Gosh et la prieure Mère Ignace. Très touché aussi de voir apparaître l’archevêque arménien, accompagné d’un prêtre qui chante admirablement les béatitudes dans sa langue. Protestants, orthodoxes et catholiques sont tout naturellement ensemble. C’est le Recteur de l’église luthérienne qui a si bien préparé cette prière. De petites affiches jaunes étaient visibles un peu partout dans la vieille ville pour l’annoncer. Des bougies posées à même le sol tracent une croix. Nous pensions être tout au plus une cinquantaine. Nous sommes plus de cent, ce qui ne correspond pas tout à fait aux prévisions du Recteur pour le repas. Il me demande : « Que ferons-nous si nous sommes plus nombreux ? » Je lui réponds : « Nous rirons et partagerons. » Et c’est ce qui se passe. Et il y a des restes !

À Beit Sahour (le Champ des Bergers), commune qui fait maintenant partie de Bethléem. Le Père Aziz m’accueille chaleureusement. Il a traduit des chants de Taizé en arabe après un séjour sur la colline avec des chrétiens palestiniens. Nous nous retrouvons dans sa paroisse pour une prière avec quelques jeunes. Le lendemain, à la messe du dimanche qui marque le début de l’Avent, il me demande de dire quelques mots ; le lieu et la saison liturgique sans doute m’inspirent de faire un bref commentaire de ces paroles de frère Roger : « Si chacune de nos journées pouvait être comme une nuit de Noël… »

Retour à Jérusalem et visite de la cathédrale arménienne en compagnie de l’archevêque Arvis Shirvanian qui m’a invité pour un moment de prière avec la quarantaine de séminaristes arméniens en formation à Jérusalem. Il est émouvant d’entendre l’Archevêque parler de saint Jacques, premier évêque de Jérusalem, dont les reliques sont vénérées en ce lieu. Il n’y a pas de bancs dans l’église, mais de grands tapis sont étendus au sol, encadrés par quatre piliers. Autrefois les Arméniens avaient un très grand nombre de monastères à Jérusalem.

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Rencontre avec des jeunes Palestiniens à Bethléem

De nouveau à Bethléem pour une rencontre avec des jeunes Palestiniens au Monastère de l’Emmanuel où vivent une petite dizaine de Sœurs bénédictines. Trois d’entre elles, dont l’abbesse, sont jeunes. Avec les jeunes Palestiniens, – certains sont venus à Taizé –, nous apprenons quelques chants de Taizé en arabe puis nous formons trois petits groupes pour échanger sur cette phrase de frère Roger : « Si la confiance du cœur était au commencement de tout… » Notre rencontre se termine par une belle prière. Des jeunes luthériens de Beit Jala qui étaient à Taizé l’an dernier sont venus pour cette rencontre. Nous avons de la peine à nous quitter.

Le lendemain, je suis à l’Université de Bethléem. Bel échange avec les aumôniers. Le projet d’un voyage à Taizé d’un groupe de jeunes Palestiniens prend forme. Sœur Patricia, une Maltaise qui est en Palestine depuis 25 ans, a déjà conduit d’autres groupes à Taizé. Elle évoque l’immense déception de ces jeunes en arrivant dans notre village de Taizé où il n’y ni boutiques, ni restaurants, puis la découverte progressive d’une autre joie, celle qui naît de la prière commune et des échanges avec d’autres. Nous parlons également d’une possible rencontre de jeunes, même si elle est modeste, dans la région de Bethléem.

Liban

Me voilà au Liban, où je ne suis pas revenu depuis 1982. Ziad et quelques amis ont préparé un programme d’une belle densité : rencontre dans trois universités catholiques, prières dans plusieurs paroisses, rencontre avec le Patriarche maronite nouvellement élu, trois émissions de télévision et une interview avec le plus grand quotidien de Beyrouth…

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Prière à Byblos au Liban

Certains se souviennent de la visite de frère Roger en 1982. C’est le cas du Père Toufiq qui est maintenant chargé de la pastorale des jeunes au Patriarcat maronite. Avec lui et d’autres, notamment le secrétaire général du Conseil des Églises du Moyen Orient, tout nouvellement élu, nous parlons d’un groupe de Libanais de plusieurs confessions qui pourraient se rendre à Taizé en 2012.

Demi-journée à l’université Notre-Dame à Beyrouth ce matin. Le Père Boulos, prêtre grec orthodoxe, m’invite à donner son cours consacré au monothéisme. Il s’agit de parler du christianisme en évoquant l’expérience de Taizé pendant une petite heure à des étudiants chrétiens et musulmans. Les étudiants se montrent très attentifs et un bel échange a lieu à partir de leurs questions.

Ziad, qui est beaucoup venu à Taizé pendant ses études en France, est professeur dans cette même université et vice-doyen des étudiants. Il a donné rendez-vous à midi à tous ceux qui le souhaitaient pour une prière et un échange avec un frère de Taizé. Je m’attends à un tout petit groupe. Mais voilà que la grande salle où a lieu notre rencontre est remplie de jeunes. Ils sont environ 120. Là également chrétiens et musulmans sont ensemble. Nous visionnons le DVD « La vie à Taizé » que je complète par quelques explications, puis de nouveau un bel échange avec les étudiants.

Visite à l’Association Adyan fondée en 2008 par le Père Fadi Daou et Nayla Tabarra : Adyan. Le mot « confiance » revient souvent dans leur documentation. Eux aussi voudraient construire la confiance entre religions, entre cultures, entre peuples. Ils ont compris le rôle primordial de l’éducation dans ce domaine et produisent quelques outils en ce sens. Belle rencontre avec Nayla Tabarra. Musulmane, elle a vécu trois jours chez nos frères au Bangladesh et en parle avec chaleur. On a confiance dans l’avenir du Liban quand on rencontre des personnes de cette qualité et que l’on découvre leurs initiatives.

Dernière mise à jour : 14 décembre 2011