Tout commence lorsque – il y a quelques décennies – une religieuse de la communauté de Sainte-Marie-de-Namur, Sœur Claudette, décide d’inviter des jeunes du Québec et de la région d’Ottawa qui connaissent Taizé à animer des rencontres dans le nord de l’Ontario où cette religieuse passe plusieurs années. Deux petites villes, peu connues sont choisies : Chapleau et Timmins. Plusieurs jeunes s’intéressent au projet du Concile des Jeunes et au cours de cet été-là se rendent en France avec Sœur Claudette. Mais elle ne tardera pas à recevoir une nouvelle mission.
Quittant le nord de l’Ontario, elle arrive à Ottawa. Inspirée par l’appel de frère Roger à tenir ensemble lutte et contemplation, elle lancera, avec d’autres sœurs, le Centre des jeunes où elle alliera projets auprès des pauvres et découverte de la vie intérieure et de la prière. Ottawa aura d’ailleurs l’immense joie d’accueillir le frère Roger en personne au début des années 1980 ; la cathédrale Notre-Dame d’Ottawa est bondée pour l’occasion !
Au départ sporadiques, les prières avec les chants de Taizé deviendront plus régulières dès 1990. Animées initialement par des jeunes ayant fait le pèlerinage, les soirées Taizé du Centre des jeunes prennent de l’ampleur au fil des décennies, commençant par accueillir environ 40 à 50 personnes, remplissant à craquer la petite salle de conférences du couvent. Vers 2001, vu leur popularité et l’arrivée dans la communauté d’une sœur musicienne, on déplace les rencontres pour les tenir dans une salle plus spacieuse à l’Église du Sacré-Cœur, paroisse située sur le campus de l’Université d’Ottawa, installant ainsi ces prières, comme l’encouragent les frères de Taizé, en milieu paroissial.
Les prières mensuelles attirent aujourd’hui près d’une centaine de personnes, principalement des jeunes adultes, mais aussi bon nombre de personnes plus âgées ayant connu Taizé dans leur jeunesse ou ayant des enfants auxquels elles souhaitent faire découvrir Taizé. Les visites annuelles d’un frère de Taizé dans la capitale y sont un temps fort de l’année ; même la salle spacieuse de l’église du Sacré-Cœur est comble pour l’occasion !
Comment expliquer cette popularité et la présence si régulière de tous ces jeunes et moins jeunes de la région d’Ottawa-Gatineau à chaque prière ? On peut nommer d’abord les pèlerinages à Taizé en France qui ont eu lieu tous les deux ou trois ans depuis 1991 : voyages extérieurs qui mènent au voyage plus intérieur et à davantage de disponibilité pour l’écoute de Dieu. Mais il faut ajouter cet accent posé sur ce qui nous rassemble plutôt que sur ce qui nous divise, cette humilité qui fait fi de toute tentation d’intégrisme ou d’esprit de clocher. Tout cela constitue une bouffée d’air frais dans notre monde de plus en plus compliqué et belligérant.
Fenêtre ouverte sur le mystère, le temps de silence contenu dans chaque prière attire, comme un puissant aimant, la présence de celles et ceux qui recherchent la paix du cœur et l’espérance de l’Évangile.
Enfin, peaufinée une heure avant chaque prière par un petit groupe de chanteurs et de musiciens, la beauté des chants de Taizé porte à l’intériorité sans oublier la joie. « Dans nos obscurités, allume le feu qui ne s’éteint jamais ». Même celles et ceux qui n’ont jamais chanté de leur vie découvrent le bonheur de participer au chant polyphonique. Chanter « jusqu’à ce que la joie revienne », comme le disait frère Roger, un moyen de résister à tant de messages anxiogènes.